lundi 1 février 2016

De la fierté à la peine

Rendre l’impossible; possible.
Voilà qui est vrai dans le cas de nos trois sculpteurs madelinots, Adrien Gaudet, Edmond Cyr et André Vigneault, qui année après année, ont toujours porté les couleurs des Îles de la Madeleine et celles de l’Acadie au festival international des sculptures sur glace du Carnaval de Québec. Encore une fois cette année, ils ont fait preuve d’une imagination sans borne en créant de façon éphémère une pièce illustrant ce mollusque bien connu des Îles, le dollar de sable. Ces trois créateurs méritent totalement tous les honneurs et la reconnaissance que les Madlinots leur réserveront.

Porter à la connaissance du grand public l’existence de cette pièce vivante au fond des mers n’a fait qu’ajouter à l’audace de ces bâtisseurs d’œuvres de glace. Aussi, il serait dommage d’oublier que ces artistes ne sont pas que des tailleurs d’œuvres éphémères. Chacun a dans ses bagages un secret de création, soit inconnu ou pas encore connu à sa juste valeur. Il en va ainsi pour le conteur André Vigneault qui trouve toujours dans sa besace de quoi entretenir un auditoire avec ses contes et légendes. Adrien Gaudet construit presque dans le secret de superbes maquettes de navires en plus d’être un artiste peintre qui aime s’ignorer lui-même. Quant à Edmond Cyr, il est aussi tailleur et sculpteur de mots comme en fait foi cet écriteau planté dans la neige sur le site des sculptures carnavalesques. Peut-être trop ignoré par les passants, le texte qui suit n’en valait pas moins la valeur d’une description poétique qui avait tout l’air, elle aussi, d’une sculpture.
Dollar de sable – Dollar de rêve

Tombé de la poche de Neptune
Blanchi par soleil et vent
Sa valeur de bouts de chandelles
Est l’ennemi des bourses et des fortunes.
Chasser ce huard irrationnel
Le long des plages au mois d’août
Fascine petits et grands
Soulève leurs rêves les plus fous
Plus loin que l’horizon
Au-delà de la raison
Au-delà de l’invisible
Rendant l’impossible; possible.

Sirre

De la fierté à la tristesse

Adieu Dorélas

Il fut mon élève pendant les deux années où j’ai enseigné la langue seconde à la polyvalente des Îles. Dorélas était de ceux qu’on n’oublie pas. Impossible en effet de ne pas s’attacher à ce jeune un tantinet hyperactif, toujours joyeux, prompt à la répartie, jamais grossier et comme noyé dans une éternelle rigolade face aux aléas d’une classe d’ados en mal d’action. Il est parfois des gens qui passent comme un éclair dans nos vies et qui laissent une trace indélébile de bonheur, et ce, sans que l’on sache vraiment pourquoi.

Je ne connais rien de sa vraie vie en dehors de ce contact scolaire, mis à part sa présence incontournable dans les cuisines du traversier MADELEINE. Les nombreuses fois où j’ai pris la mer à bord de ce navire de plusieurs centaines de passagers, il ne fut jamais une traversée où nous nous sommes ratés. En bref, j’ai toujours été gratifié soit par une blague, soit une offre spéciale de plat préparé par lui, soit un souvenir partagé du temps ou gamin, il aimait faire rigoler ma classe alors que péniblement, j’essayais de lui tenir la bride un tant soit peu serrée. En peu de mots, son ancien prof d’anglais était fier de sa réussite, même s’il n’a jamais su s’il avait finalement appris quelques rudiments de cette langue seconde. Sur le plan professionnel, il était devenu le cuisinier en second sur le navire et souvent le Chef lors de remplacements. Alors, quand cette semaine j’ai appris sa mort dramatique, je ne sais trop pourquoi, mais il y a des larmes qui ont fait leur chemin sur mes joues. Soudainement, je me suis senti comme un vieux professeur qui venait de perdre tragiquement un des meilleurs élèves de sa classe. J’imagine difficilement la douleur qu’éprouvent présentement toute sa famille et ses proches. Je me permets ici en tout respect de leur offrir mes plus sincères condoléances.

Mon frère décédé disait souvent : nous ne sommes pas des corps habités par des esprits, mais des esprits habillés d’un corps. Vue comme ça, la mort, si cruelle soit-elle, prend le visage d’une délivrance. Dans tous les cas, elle nous console et nous protège d’une certaine absurdité de la vie. Ainsi, je te dis Adieu Dorélas, Adieu mon ami. Puisse ton esprit trouver la paix et le bonheur au sein des étoiles et que Dieu soit ton hôte à la grande table des élus. Amen.  

GG     




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire