mardi 26 août 2014

Moments de tendres rêveries

* La mer était trop belle pour l’ignorer. Tombé sous son charme, j’en ai oublié la rédaction de mon blogue hebdomadaire. Je ne m’en excuse pas. La vie est trop courte pour ne pas profiter des cadeaux qu’elle nous offre généreusement. Des cadeaux que je partage aujourd’hui avec vous, chères lectrices et chers lecteurs. Bonne semaine à tout l’monde.

GG

IMG_0585IMG_0592

Souvenirs

 

Je me souviens de ce petit garçon

Tirant au bout d’un cordage

Le doris de son père.

Un peu comme un chien fidèle

L’embarcation suivait docilement

Ce petit homme, pieds dans l’eau

Tête dans les nuages,

L’esprit au pays des rêves.

Et depuis le perron de la vieille maison,

Sa mère l’appela.

Viens ici!

Le Père Cyr veut te rencontrer

Avant que tu partes pour le collège.

Le petit garçon avait tout juste 14 ans

Depuis quelques jours seulement.

Triste,

Il ancra d’une picasse la barque de son père

Et rentra à la maison.

Les années de collège suivirent

Et quand il s’ennuyait,

Il rêvait à son retour,

Au jour où il lèverait la picasse retenant le vieux doris

Et rames aux tolets

Il partirait encore une fois pour le large.

Quarante années plus tard,

Le doris n’est plus, le séminaire non plus,

Mais chaque fois qu’il s’endort

Le jeune homme devenu homme

Rame toujours son doris

Comme aux premiers jours

Où ils furent séparés.

Et il s’endort comme l’enfant

Qui presse sur sa poitrine son ourson.

Pour lui, nuages blancs, ciels bleus, mer émeraude

Et rames d’embarcations,

Sont autant de morceaux de bonheurs

Que paradis perdus

Au creux de cette modernité envahissante.

Georges Gaudet

IMG_0593IMG_0595

IMG_0594

lundi 18 août 2014

Un fleuve, un golfe et des hommes

Par Georges Gaudet        georgesgaudet49@hotmail.com

Ce fleuve que j’aime.

OLYMPUS DIGITAL CAMERA

Jacques Cartier y était entré par son golfe en expédition de pêche avant l’année officielle de 1534. Puis en cette année historique de prise de possession d’un territoire donné au nom du roi de France, il y est entré par le détroit de Belle- Isle, en a exploré tous les contours et remonté ses rives jusqu’à ce qui devint près d’un siècle plus tard Hochelaga (Montréal) et puis Stadaconé (Québec). Un sacré navigateur que fut ce Jacques Cartier. Non content de traverser l’atlantique en seulement 20 jours sur ce qui aujourd’hui aurait l’air d’une grosse chaloupe, il en a grossièrement cartographié tous les pourtours, décrit minutieusement les beautés et même les richesses potentielles, allant jusqu’à soupçonner les terres limitrophes de cette grande rivière de porteuses de minerai de grande valeur. Bien sûr il a fait le tour de ce que sont les Îles de la Madeleine aujourd’hui et nommé l’Île Brion du nom de son commanditaire, le Sieur de Brion. Déjà, en ce temps là, l’homme soutirait tout ce qu’il pouvait de la terre nourricière et se servait des cours d’eau comme autoroutes de transport. Cet homme savait-il à cette époque que l’avidité insatiable de l’homo sapiens avait la capacité de complètement détruire son garde-manger? Peut-être pas! – et nous n’en connaîtrons jamais la réponse. Hélas, cette possibilité est plus que réelle aujourd’hui.

Golfe 

Là ou le golfe s’apprête à devenir océan

Ce fleuve et son golfe, ils ont du caractère, des sautes d'humeur imprévues, de fortes marées en certains endroits, des courants désordonnés, des brumes sournoises, des hauts-fonds, des récifs cachés à fleur d’eau, de nombreuses îles tout le long de son parcours. Excécrables et magnifiques tout à la fois, ils peuvent être féériques, envoûtants et même séducteurs. Ce fleuve et son golfe sont une voie royale, une autoroute d’eau, l’artère principale d’un pays toujours en devenir. Les hommes qui habitent ces rives aiment ce fleuve, ce golfe aux airs d’océan. Ils en connaissent les richesses, ils en puisent leur existence depuis que leurs ancêtres et les premiers habitants de ces baies et lagunes en connaissaient les secrets. Pourtant, ils ne sont pas tous prêts à en honorer les bénéfices. Certains de ces hommes, dotés d’une volonté mercantile à courte vue et équipés d’armes d’extraction de richesses au-delà de la capacité de renouvellement de ce trésor, sont prêts à tout saccager ce riche jardin sans égard aux conséquences de demain. Bâillonnements de scientifiques, viols d’accords protectionnistes internationaux, sables bitumineux et pipelines, transports dangereux et explosifs en pleines zones populeuses, dénis de territoires protégés, extraction de gaz par fracturation de roches, dénis de lois municipales voulant protéger l’eau potable…et j’en passe.

OLYMPUS DIGITAL CAMERA

Le danger, pour ne pas dire le viol n’est pas en devenir, mais il est là présentement. Dès que les pipelines et les chemins de fer seront rendus à Québec, des dizaines de pétroliers passeront bientôt autour des Îles de la Madeleine, chargés de cet or noir, direction les pays dits en émergence. Déjà que nous sommes en danger chaque fois qu’un pétrolier vient nous livrer cette essence essentielle à notre bien-être insulaire, déjà que nous sommes en danger chaque fois qu’un seul pétrolier passe au large du Rocher-aux-Oiseaux pour amorcer un voyage transocéanique, il est facile d’imaginer ce que seront ce fleuve et ce golfe, le jour où plus rien de comptera sauf les tours de forage ou de fractionnement de la roche, que ce soit le long des rives, en pleine mer ou sur l’Île d’Anticosti. Hier, en plein milieu d’un atelier d’écriture, une personne s’exprimait ainsi.

Clair de lune (1) 

Même en pleine nuit, il est beau ce fleuve.

Il est un fleuve que j’aime plus que tout autre cours d’eau. Ce fleuve coule en mes veines, en mon cœur. Il puise sa source en plein milieu d’un jeune pays et coule au-delà des îles de mon enfance. Fleuve capricieux, brumeux, surprenant, mais franc, sans autres artifices que sa grande beauté. Il est beau ce fleuve. Son visage devient golfe, puis haute mer. Il est plein de bélugas, de baleines, d’anguilles, de loups-marins, de morue, maquereau, flétan et surtout d’humains installés le long de ses berges. Ces gens l’aiment ce fleuve, ce golfe. Hélas, d’autres ne l’aiment pas et il est en danger. J’ai peur pour lui, j’ai peur qu’on lui arrache le pétrole de ses veines profondes, qu’on le saigne comme un pauvre animal, qu’on l’abreuve de son sang noir, qu’on l’asphyxie en tenant sur son embouchure des dizaines de pétroliers, des centaines de tours de pétrole, autant d’aiguilles plantées dans sa peau, la peau de toutes ces espèces vivantes qui ne vivent que grâce à lui. «Quand il n’y aura plus d’or noir, alors les hommes comprendront peut-être trop tard que les fleurs ne poussent pas sur les derricks, que les ponts de bateaux sont de pauvres jardins, que l’or noir est imbuvable et ses résidus immangeables.» …citation inspirée d’une maxime autochtone.

Au pays du mépris de la poésie

Voilà un drôle de sous-titre me direz-vous. C’est qu’en ces temps modernes, on a tendance à mépriser ce qu’on ignore et disons que les mots ont souvent… mauvaise presse. Pourtant, dans un film sublime portant le titre de « La société des poètes disparus », on y entend un professeur dire à ses brillants élèves à peu près ceci : « Ne croyez jamais quelqu’un qui vous dit que les idées et les mots ne peuvent pas changer le monde. » D’ailleurs, l’histoire nous en fait une éloquente démonstration. Les grands écrivains, les grands philosophes, sont à la source de toutes les grandes époques, les grandes découvertes, les grandes lumières. En éteindre le rayonnement, l’expansion, c’est tuer l’humanité dans ce qu’elle a de différent avec le monde animal. Est-ce ce que nous sommes en train de faire aujourd’hui?-il est des jours où je me le demande. Nous banalisons tout ce qui vient d’un cri de l’âme, nous crions nos frustrations à travers des chants qui ont plus l’air de cris de terreur que d’appels à la raison. Nous rions de nos humanistes, de nos joyeux fous, sauf quand ils meurent. Deux d’entre eux sont partis de ce monde au cours de la semaine dernière.

Robin William

Robin William

Grand acteur ayant porté son art au plus haut des étoiles. Grand clown marqué par le mal de l’âme et la richesse terrestre. Le suicide de cet homme porte bien haut le cri d’alarme d’une humanité en grande souffrance. Par son geste désespéré, Robin William clame maintenant depuis l’éternité que la vraie richesse vient du dedans et non du dehors, que l’on peut faire rire aux larmes et pleurer dans son cœur, que l’on peut marcher dans la foule et être seul de l’intérieur, que l’on peut donner l’impression d’être libre et terriblement prisonnier de ce qui ne se voit pas. N’a-t-il pas dit : « La cocaïne est le moyen que Dieu a pris pour nous faire comprendre que nous gagnons trop d’argent? » Ce grand acteur a fait rire et pleurer le monde entier. Malheureusement, personne ne semble s’être aperçu qu’il habitait chacun de ses rôles et en demeurait totalement prisonnier. D’ailleurs, il les jouait si bien qu’il était lui-même et non l’acteur. L’acteur n’a peut-être jamais existé. L’acteur était ailleurs dans la foule, Robin William était seul, atrocement seul.

L’Abbé Gravel

L'Abbé Gravel

Il fut la preuve que l’on peut aimer une institution et en même temps, la critiquer sévèrement. D’ailleurs, n’est-il pas plus grande preuve de fidélité que d’oser remettre en question une institution que l’on aime et qui nous semble sur le point de s’écrouler?- il était le curé des exclus. Cela nous semblait un peu «à côté de la trac » comme diraient certains. Ben voyons donc! – oser remettre en question la parole de tout puissants évêques, les cardinaux, voire même le pape, lui, un ti-cul de Joliette, ex-barman et ami des robineux, des prostituées, des homosexuels, des pauvres, des malades, des mourants. Eh bien justement! L’Abbé Gravel aura été tout ce qu’un homme d’Église devrait être aujourd’hui. Jésus n’a-t-il pas été l’ami et le consolateur de tout ce beau monde? Ah oui, c’est vrai, j’allais l’oublier. On l’a crucifié aussi. L’Abbé Gravel était un « brasseux de cage », nullement impressionné par les dogmes érigés par des hommes et prétendument sanctionnés par Dieu. Nul doute que de là-haut, si Jésus le rencontre, ils auront peut-être un mot à dire à ce Dieu, car son monde, il est loin d’être parfait. Il est plutôt pas mal foutu de ces temps-ci.

Bonne semaine à toutes et à tous.

GG

dimanche 10 août 2014

Un peuple avec un drapeau, sans pays et toujours debout

 
Drapeau Acadien

Crédit photo: Dominique Damien.

Vendredi, le 15 août, beaucoup d’Acadiens de par le monde fêteront l’Acadie, leur Acadie d’hier, celle d’aujourd’hui et celle de demain… pourvu qu’elle continue d’exister. Pays impossible à conquérir puisqu’il n’existe pas, culture insoumise puisqu’elle est unique, fierté justifiée puisqu’elle naquit à l’époque de Champlain et survit depuis 1755 envers et contre toute logique, les Acadiens demeurent et fêteront avec espoir en ce 15 août prochain. 
S’il en est ainsi, c’est peut-être parce qu’il existe dans les rangs de ce peuple sans frontières ni pays, des gens exceptionnels, des gens dont l’ordinaire est devenu extraordinaire seulement par leur présence. Personnages humbles, rieurs, sans complexes, effacés et présents en même temps, capables de tout et de rien, mais toujours porteurs de leurs racines solides, plantées au milieu de nulle part et pourtant toujours présentes en nos coeurs.
Roger
En cette journée,  des gens de chez nous, particulièrement de Havre-Aubert, fêteront et se rappelleront d’un type qui portait toujours avec fierté les couleurs de son Acadie, l’Acadie qu’il aimait profondément, ce drapeau dont il avait même fait sa cravate de noces, cette étoile dorée qu’il portait tatouée sur le cœur. Il s’appelait Roger Gaudet. Il n’avait rien de particulier, n’était ni politicien ni investisseur, ni spécialiste en quoi que ce soit. Il gagnait humblement sa vie et était lui-même tout simplement « ACADIEN ». Parti trop jeune un jour de printemps, ce jour de juin 2007, je me suis rendu dans son village. Un drôle de silence y régnait, un peu comme si tout le village s’était tu.
Quai à Roger
Roger nous rappelait constamment nos origines et sa fierté décapante teintait la nôtre. Il était de cette race d’entêtés, de passionnés, sans qui nous ne serions plus ici aujourd’hui. Notre Champlain moderne, même après son départ, trouve encore le moyen de nous rappeler nos racines. Peut-être est-ce à cause de gens comme lui que nous continuons d’exister, de la Louisiane à la Basse-Côte-Nord, de l’Abitibi aux côtes de Saint-Pierre et Miquelon, de toutes les rives du fleuve Saint-Laurent jusqu’aux belles terres du Nouveau-Brunswick, de ses havres colorés aux grandes marées de la Baie de Fundy en Nouvelle-Écosse.
Que l’on soit Canadiens, Québécois, Américains, Français ou Louisianais, nous sommes ceux qu’on appelle « LES ACADIENS », et vendredi, ce 15 août, ce sera notre fête.
GG







lundi 4 août 2014

Tranches de vie

 

* Il est des étapes dans la vie qui demeurent  incontournables. La semaine dernière, je suis passé par l’une d’elles. Alors, voici un texte fait de mots jetés sur papier comme graines de fleurs sauvages poussées par le vent et que j’ai d’abord dédié à celle qui m’a fait découvrir l’amour à la croisée de nos chemins. Aussi, je souhaite partager avec vous, lecteurs et lectrices, «cette tranche de vie», aussi dédiée à tous ceux et celles qui ont aujourd’hui 65 années… et encore plus.

moi 65 ans

Avoir 65 ans, c’est…!

Avoir 65 ans, c’est… accepter,

 

Accepter que le temps qu’il nous reste

Sera certainement plus court que celui qui nous fut donné.

 

Accepter d’avoir perdu tant d’amis,

Tant d’amours, tant d’opportunités, tant d’occasions.

 

Accepter nos malaises, nos douleurs, nos rides, nos faiblesses.

 

Avoir 65 ans…

C’est réaliser que nous sommes des survivants,

 

C’est réaliser que cette vie qui fut parfois un champ de fleurs,

Fut plus souvent qu’autrement, un théâtre de guerre.

 

C’est réaliser que sur ce champ de bataille,

Sont couchés nos amis, nos frères, nos sœurs, nos parents,

Et nous… qui sommes toujours debout.

 

C’est réaliser que si nous avons toujours l’épée à la main,

Ce n’est pas à cause de notre talent ou de notre force,

Mais bien par la chance qui nous fut accordée,

Sans raison apparente, sans explication.

 

Avoir 65 ans,

C’est réaliser que la seule vraie valeur,

C’est ce cœur qui aime, cette main qui touche, ces yeux qui témoignent.

C’est dire aux autres,

Que nous sommes toujours vivants, utiles,

Et riches d’une vie qui ne demande qu’à partager.

 

Avoir 65 ans,

C’est dire au reste du monde,

Que notre vécu, notre expérience, notre savoir,

Peuvent être bien plus efficaces,

Que la meilleure des lames d’épée.

 

Avoir 65 ans,

C’est laisser tomber son armure et sa cotte de mailles,

Pour les remplacer par le manteau de la paix,

Le manteau de l’amour,

Le manteau du pardon à soi… et aux autres.

 

Avoir 65 ans,

C’est enfin vivre,

Drapé de l’essentiel et soulagé du superflu,

L’esprit tranquille,

L’intelligence toujours aux aguets,

L’âme se donnant le temps de plonger dans la découverte,

La découverte de ses origines, la découverte de son identité.

 

Avoir 65 ans,

C’est réaliser qu’on nous a menti, triché, leurrés,

Mais qu’au-delà de ces trahisons,

C’est aussi découvrir « La vérité » — sa vérité.

La seule vérité, l’unique,

Celle pour qui il vaut même la peine d’en mourir,

Et cette vérité, le monde en a plus besoin que jamais,

Et elle s’appelle,

AMOUR.

 

Georges Gaudet

31 juillet 2014.