R.I.P. pour la boîte manuelle… ?
*Depuis
quelques semaines, les fabricants de l’automobile clament sur toutes les
tribunes la fin de la transmission manuelle sur toutes les voitures ou presque.
La manœuvre est habile puisque ces compagnies vont probablement gagner sur tous
les plans. Le 1500. $ supplémentaire ajouté au prix de la voiture à
transmission automatique ne va certainement pas être soustrait du prix de base
et quant au consommateur qui souhaitera toujours obtenir une transmission manuelle, on
lui dira que c’est tellement rare qu’il y a un prix additionnel ajouté à son
véhicule. Voilà qui s’appelle «se faire enfiler un sapin » vous savez où, et
encore là, je suis très poli.
Il y a trois semaines, j’ai
échangé ma voiture pour un autre modèle tout en précisant que je voulais un
véhicule avec transmission manuelle. Le vendeur a écarquillé les yeux et m’a
regardé comme si j’étais un extraterrestre, à moins qu’il me prit pour un produit
du Neandertal.
Et
pourtant !
Quand mon père eût sa
première voiture, une Envoy (Vauxhall) quatre cylindres, payée 1900. $ toutes
taxes inclues, j’avais 12 ans, presque 13. Au salaire de 165. $/mois en
ces années-là, c’était tout ce qu’il avait pu s’offrir. Je me souviens alors que parfois, quand je
m’étais bien comporté à l’école et qu’il était fier de moi, sa façon de me
récompenser était bien spéciale. Toujours conducteur, il enfonçait la pédale
d’embrayage (la clutch) et me disais :«
change les vitesses. » J’ai alors appris tôt que le parcours du bras de
transmission posé à l’horizontale du côté droit du volant avait un parcours
ressemblant à la lettre «H ». (1) en bas vers soi, (2) en haut vers le tableau
de bord et (3), tout en bas à la verticale. Pour le recul, il suffisait de
remonter jusqu’à la barre horizontale de la lettre H et tirer vers soi puis
remonter tout en haut, le plus près possible du volant. Et c’est ainsi que j’ai
appris à maîtriser « l’art » de
l’embrayage du premier véhicule que j’ai conduis. Ne le dites à personne, mais
en fin d’été, lors de la saison des foins, j’ai obtenu le privilège de me
promener « tout seul » entre les « mûlerons » de foin dans l’enclos non
loin du domicile. J’étais devenu le distributeur de « Kool-Aid » avec glaçons auprès de toute la population ouvrière du
champ de foin, ceci au grand dam de mon plus jeune frère qui brûlait d’envie de
faire pareil.
Aujourd’hui, je roule
toujours en voiture manuelle et j’adore. Après plus d’un million de kilomètres
sur les routes de presque toutes les provinces canadiennes, 17 états
américains, quelques milliers de kilomètres en France et cinq années
d’enseignement à temps partiel dans une école de conduite automobile, j’éprouve
toujours le plaisir de fermer la radio et d’écouter le moteur respirer entre
chaque changement de vitesse de même que le bruit des pneus mordant le bitume
comme autant de chevaux parcourant la plaine. Bien sûr, les choses ont évolué.
Je dispose maintenant d’un système d’injection sur les cylindres, ce qui
minimise les mauvaises toux du moteur et de 6 points d’embrayage en plus d’un
synchronisme adéquat et un anti-recul au point de friction de la première.
Quant à ce dernier gadget, je le déteste parce qu’il dispense de cette belle
maîtrise de ce fameux point de friction en position arrêtée et en pente. Eh
oui, je suis peut-être un dinosaure de la route et ce dinosaure, il a
l’impression de conduire et d’y éprouver un véritable plaisir. Plutôt que de
rouler à 140k/h sur une autoroute pleine de radars réglés à 100k/h et de
stresser en promenant le regard constamment entre la route et mon texto en plus
de parcourir 123 pi/s ou 37 m/s à l’aveugle chaque fois que je baisse le regard
sur mon «cell», je me fais plaisir de
rouler, que ce soit à 50 k/h ou 100 k/h en écoutant ma musique préférée, le
ronflement de mon moteur tout en maintenant constamment le regard sur la route.
Eh oui, les temps ont changé
et est-ce pour le mieux ? La plupart du temps, certes, mais tout peut être
relativisé. Regardons le monde de l’aviation par exemple. Il est aujourd’hui
plus sécuritaire de prendre l’avion que de se rendre à l’aéroport et ceci grâce
à l’évolution de la technologie. Toutefois, le vieux pilote d’avion plus léger
qui transportait entre 2 et 5 passagers, le manche à balais (le volant de
l’avion) entre les jambes et deux magnétos pour le feu sur les cylindres, avait
comme choix de trouver un terrain vague pour poser son appareil en vol plané si
le ventilateur qui lui tenait lieu de moteur décidait de s’arrêter. Cela
pouvait se résumer entre un succès et/ou quelques pertes de vies. Aujourd’hui, un
Dreamliner de Boeing ou un Airbus A380 peut transporter entre 350 et 700
passagers de façon extrêmement sécuritaire. Toutefois, selon les lois de la
statistique, un drame va arriver un jour. Si par exemple, les deux moteurs
arrêtent sans explications comme cela est arrivé dans le cas du commandant
Piché, le commandant de bord et son copilote devront soit se fier aux nombreux
ordinateurs qui contrôlent à peu près tout et se mettre à prier, à moins qu’ils
aient le temps de se farcir un volume de 500 pages sur les causes possibles
d’une telle panne. Dans un cas exceptionnel, tous peuvent avoir la vie sauve,
mais un jour arrivera, statistiquement parlant, que plus de 500 vies seront
perdues. Pour en arriver là, il faudrait entre 100 et 500 «crash» de petits avions. Comme quoi, tout peut être mis en perspective.
Quant aux internautes au
mépris maladif envers les gens qui ne pensent pas comme eux et qui disent que
la disparition de la transmission manuelle va débarrasser les routes des «clutcheux», je vais être impoli ici et
je les «emmerde» avec plaisir. Dans peu de temps, ils auront tout le
loisir de rouler comme ils le veulent avec des caméras avant, arrière, sur les
côtés. Des bip-bip un peu partout et pas de volant. Ce sera l’ordinateur qui
conduira à leur place et ils auront tout le temps de texter leurs infamies sur
les réseaux sociaux en s’en allant travailler comme des robots, tous ensembles,
à la même place et pour le même employeur… un propriétaire inconnu de cette
immense machine qui dirigera la moindre parcelle de leur vie. Le cerveau est un
muscle qu’on dit paresseux et si on le met au rancart en laissant les ordis
tout gérer, je ne suis pas certain que la race humaine demeurera toujours
maître de son destin, mis à part cette minorité qui détiendra l’ensemble des
DATA «données»
de ce monde.
En 5e année du
primaire, j’ai péniblement appris à extraire la racine carrée d’un nombre sans
l’aide d’une calculette. Certains diront que cela ne m’a servi à rien.
Peut-être, mais qui sait ce que mon cerveau à acquis par cet exercice. En
terminant, je peux aussi recourir à un correcteur de texte automatisé, mais
malgré tous les avantages qu’il me procure, je ne peux me permettre de lui
faire entièrement confiance. Mon écriture est imparfaite, souvent bourrée
d’anglicismes volontaires ou non, mais j’ai le contrôle de ce que je souhaite
exprimer et de plus, les sentiments, les émotions, lui, il ne connaît pas.
Quant aux fameux participes passés, il se bute souvent au dernier nom qui
apparaît dans sa mémoire faite de zéros et de un.
*Alors,
j’embarque dans mon «char», je tourne la clef «on», pis j’gearshift en
première, j’lâche la clutch pis envoye la vieille, on part pour du pur plaisir…
en attendant le char à batterie «energiser» ou «duracell».
Bonne semaine à toutes et à
tous.
Allo, un autre bon texte que celui-là. Je me promène moi aussi depuis toujours en voiture manuelle et lorsque je la laisse chez mon concessionnaire pour un entretien, celui qui me la rapporte me regarde toujours comme si j'étais une extra-terrestre... ce n'est pas possible qu'une femme au Texas conduise manuel?????? Eh oui, c'est mon choix et pour les mêmes raisons que vous Georges!
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