samedi 25 avril 2020

J’ai vu le diable

Essai écrit et publié en 2002
Plusieurs m’ont demandé où j’avais pris ma source d’inspiration pour écrire l’essai UN CRI DANS LA DUNE publié en 2002. Bien sûr, l’inspiration ne vient pas que d’un seul endroit, mais je peux quand même partager avec les lectrices et lecteurs quelques moments d’éveils bien particuliers.

Au début des années 2000, précisément en juillet, je débarquais pour la première fois à Las-Vegas en pleine canicule. Le lendemain de mon arrivée, vers 8hr le matin, tout juste avant que le thermomètre atteigne les 39ºC, (102ºF), je marchais sur la rue Fremont. Déjà, dans cette ville qui ne dort jamais, le bruit des machines à sous emplissait l’atmosphère de l’endroit et même à cette heure, une quantité impressionnante de personnes, cartes insérées dans les machines, pressaient frénétiquement les boutons de ces appareils tout en espérant y découvrir le gros lot, sous-entendu…le bonheur. 

C’est là que je crois avoir vu le diable pour la première fois. Pas un être avec des cornes, une fourche à foin à la main et une queue en pointe de flèche, oh que non!...mais une machine infernale, portrait d’une société en déclin, porteuse de faux rêves, gobeuse d’économies de vies entières, le tout bien programmé pour donner l’impression que le bonheur est au bout de ces millions de «blings blings», un peu comme si l’argent obtenu par une infime minorité de personnes, pouvait être accessible à tous. En somme, un immense mensonge m’est apparu en pleine face. Las-Vegas n’est pas exceptionnelle. Cette ville peut être belle et surtout l’État du Nevada dans lequel elle se trouve, comporte son lot de beautés qu’il vaut la peine de voir. Aujourd’hui, ce diable, il est partout, dans les moindres recoins du monde, de la Côte d’Azur à Rio, de Johannesburg  à Vancouver en passant par Montréal et presque toutes les petites communautés de notre planète Terre. 

Il faut ajouter qu’entre 1976 jusqu’en 1979, trois années d’études en communications avec option publicité m’avaient déjà formé à une certaine observation de notre société. Sous le titre pompeux d’une création publicitaire «informative», j’y avais vite découvert la manipulation des masses, la création de l’illusion d’un besoin essentiel qui ne l’est pas vraiment et pire, le comment propager un mensonge à répétition pour qu’il nous semble être une «vérité». Bien sûr, on ne nous enseignait pas ça comme tel, mais pour qui savait s’arrêter pour penser un tant soit peu, cette réalité se révélait d’elle-même.

Le Mont Charleston à environ 100 km de Las-Vegas.
Ainsi, après avoir dépensé 21.$ en deux années dans les casinos (oui-oui…21.$ seulement), mais probablement plus de 400.$ en déjeuners riches en graisse de bacon dans les restos de ces casinos, je me suis permis une escapade de ski de printemps au mont Charleston à environ 100 km de Las-Vegas. Comprenez-moi bien, je ne suis pas contre le plaisir, loin de là. Le plaisir, la joie et le bonheur sont cousins cousines d’une vie heureuse, mais je ne crois pas que ce soit à n’importe quel prix. Pour les croyants, Jésus n’a-t-il pas fêté au noces de Canaan avec du vin, même qu’ils en auraient manqué. C’est donc après avoir quitté la ville au bas de la vallée par déjà 20ºC (68ºF) en cette fin de février que je me suis permis de dévaler une superbe pente de ski, torse nu, la peau comme une fesse de bébé, tout en profitant d’un soleil volontaire se reflétant dans la neige déjà granuleuse. Et puis, c’est du haut du monte-pente que je vis Las-Vegas dans sa réalité. L’air était pur en haut du mont Charleston, les sapins, les pins et les épinettes étaient en santé et la neige recouvrait encore la presque majorité des sommets avoisinants. Hélas, tout en bas, dans la vallée, un nuage d’une couleur indéfinissable, allant du gris sombre au jaune fade en passant par une traînée presque rouge masquait les beautés de cette ville. La pollution m’apparut dans toute son horreur, même s’il n’était qu’en début d’après-midi. C’est alors que je compris vers où s’en allait tout notre monde. Las-Vegas n’était qu’un infime portrait de toute la terre. Une machine infernale régissant par la publicité, la propagande, une illusion de bonheur tout en offrant du travail à une masse critique pour que celle-ci, gobeuse de ce qu’on veut bien lui montrer, soit prête à travailler jours et nuits afin de se payer, en un court laps de temps, une illusion de bonheur des millions de fois jamais atteint. 

Plus tard, en fin de journée, je revins chez ma compagne d’alors et je décidai de me construire une petite remorque avec laquelle je revins chez-moi en début de mai, tout en la tirant derrière ma petite voiture de 4 cylindres à travers tous les États-Unis, soit un parcours de plus de 5000 km. Je voulais à la fois vérifier ma théorie observée sur l’état du monde, tout en profitant des beaux coins de ce pays et en y observant plus que jamais ses habitants. Je me souviens de cette journée ou un matin, assoupi dans ma petite voiture sur un stationnement de centre d’achat, j’ai vu cette foule pressée, entrant au travail comme autant d’esclaves afin de nourrir la machine qui allait fournir à d’autres, des besoins parfois essentiels, mais trop souvent des jouets inutiles, créateurs de bonheurs inexistants. Cette scène était tellement surréaliste que je me suis demandé si j’étais vivant ou simplement mort et invisible à tous ces gens immensément pressés et au regard vers le sol et non vers le ciel déjà gorgé de soleil. De plus, je me prouvais à moi-même que l’on pouvait voyager et voir le monde à peu de frais et dans une grande simplicité. 

Un petit repos quelque part au Tenessee dans une halte routière.
Pendant plus d’une dizaine de jours, j’ai dormi dans mon petit campeur de 7 pieds par 4 pieds et 4 pieds de hauteur, construit en contreplaqué et arrêtant dans les «truck stops» et autres facilités du genre en plus d’un arrêt bien accueilli dans une famille de la ville d’Indianapolis, capitale de l’État de l’Indiana. Quelques jours plus tard, j’arrêtai à Longueuil au Québec pour y prendre livraison des 500 copies de mon essai UN CRI DANS LA DUNE. Le moment où j’ouvris les caisses de livres, je me mis à pleurer. Cela faisait depuis 1976, soit plus de 20 ans que j’observais ce monde avec la conviction qu’il allait tout croche et qu’on ne pouvait continuer ainsi. Ne sachant que faire pour exprimer ce désir de partager cette observation, j’avais décidé de la crier à travers les feuilles de ce livre, UN CRI DANS LA DUNE. 

Je ne suis pas nécessairement un partisan de la théorie du complot, car je crois que parmi les êtres de ce monde, il y en a des bons dans tous les domaines et de tous les partis politiques. Cependant, je ne peux ignorer cette vision qui s’impose lentement à l’humanité entière. De tous les temps, que ce soit à partir de l’homme des cavernes en passant par les systèmes féodaux et jusqu’à nous, de guerres en guerres, de tyrans en systèmes dits démocratiques, la cupidité des hommes à toujours brillé par sa présence. Aujourd’hui, contrairement aux époques passées où la valeur monétaire représentait un bien concret, nous en sommes arrivés, grâce à la puissance informatique et à la carte plastique, à un système monétaire artificiel qui ne veut rien dire du tout. La banque mondiale n’appartient qu’à des groupes privés et elle prête à nos gouvernants de l’argent virtuel inexistant avec intérêts, soit de l’argent symbolique de rien et que nous citoyens présents et futurs, devront rembourser tout aussi virtuellement, par notre travail, sinon sous peine de mourir ou de devenir misérables. En somme, rien n’a changé depuis la nuit des temps. Il nous aura fallu un tout petit et invisible ennemi affreux, un «covid» pour nous faire réaliser dans quel enfer l’humanité risque d’être plongée et ceci avec l’appui d’une majorité manipulée par les peurs de toutes sortes, et ce qui est pire, avec des résultats macabres réels, source de doubles peurs. Une humanité qui ne vit que par la peur et une croissance obligée, sera bien un jour, obligée de ralentir. Sinon, d’autres «covids» de toutes autres natures rendront à la terre, notre unique vaisseau spatial, toute la place et le respect qui lui est dû. Déjà que d’avoir classé les gens de 70 ans et plus, sans considération de leur état de santé et de dangerosité, demeurera un précédent d’âgisme qui risque de n’être que le début d’une volonté de sélection qu’on prétendra justifiée et naturelle, alors que le but final sera de maximiser la rentabilité des nations, toujours au service d’une productivité essentielle pour…un système anonyme au service de quelques-uns. Si vous lisez mon petit essai de 2002, vous verrez vite que mon CRI DANS LA DUNE, c’est un peu tout ça, à travers 70 années d’existence.

*Si vous avez lu jusqu’ici, cela me permet de vous informer que dans les jours à venir, je vais tenter de formater cet essai en version PDF afin de l’offrir gratuitement aux gens qui souhaiterais en obtenir une copie numérique. À bientôt peut-être. 
Georges Gaudet       

    

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