mardi 2 avril 2013

Écrire et écrire encore… avant que la mémoire n’oublie.

Ça y est, notre roman Madelinot, un « suspense » dont le titre sera UN CADAVRE DANS LE CHALUT est parti pour le comité de lecture. Dominique et moi avons l’impression de participer à la naissance d’un bébé, un bébé que nous avons fait à deux, comme dans la vraie vie quoi!

Dominique et Georges

D’ici la mise en marché, nous nous en détachons un peu comme des parents qui laissent aux infirmières le soin de langer le bébé. Évidemment, comme une dépendance dont nous ne pouvons nous libérer, nous continuons, chacun à notre rythme, à écrire sur tous les sujets qui nous intéressent. Ainsi se passent nos ateliers d’écriture, chaque mercredi en soirée. Personnellement, je vous fais cadeau de deux textes dont le défi était une rédaction ne devant pas dépasser 20 minutes de création, le tout à partir d’un thème proposé par l’animateur, Georges Langford.

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Photo Georges Gaudet

Les quais, les bateaux, les marins, les bistros, tous ces univers qui servent de toile de fond aux plus grandes histoires maritimes du monde, demeurent aussi l’essence même de la petite histoire, celle des couples en amour, celle des adultes dont la jeunesse est gravée dans la mémoire du temps.GG

Le devoir

À partir du thème « Les endroits publics », il fallait se laisser inspirer de la phrase suivante : « En fin de journée, c’est tout le village qui défile au bistro du bord de mer.» Voici donc ce que cela a donné :

Un amour à saveur océane

Elle était seule derrière le bar. Linge à vaisselle sur l’épaule, les mains dans le savon de l’évier, les bucks de bière semblaient attendre ses caresses. Un à un, tout en fredonnant un air qu’elle semblait être la seule à connaître, elle les lavait, les essuyait, et avec un sourire hésitant entre le rictus et le charme, elle les déposait délicatement sur la tablette de verre juste devant le miroir.

C’est là qu’elle le vit. Il venait d’entrer discrètement, presque sur la pointe des pieds. Déposant son sac de marin sur une chaise, il la regarda de cet air qu’elle connaissait si bien, même si cela faisait six mois qu’elle ne l’avait pas vu. S’élançant l’un vers l’autre, ils s’embrassèrent goulument, passionnément, sans retenue, lèvres contre lèvres, corps contre corps, cherchant en l’autre toute cette chaleur, cette passion qui leur avait tant manquée.

— Tu es toujours aussi belle qu’il lui dit!

— Et toi, toujours aussi menteur qu’elle lui répondit tout en lui déposant de ses lèvres charnues, un tendre baiser juste sur le bout du nez.

Leurs mains finirent par se quitter avec regrets. Lui s’assit à une table au fond du bar, elle, reprit sa place derrière le comptoir, devant le miroir. Il fallait se retenir un peu, car en fin de journée comme ça, c’était tout le village qui passait par le bistro du bord de mer.

GG

L’autre devoir

Le thème était « Sur les quais » et la proposition d’écriture se déclinait ainsi : « C’est noir de monde sur le quai! — Que se passe-t-il? »

C’est curieux, mais chaque fois que je suis coincé dans le temps pour rédiger un texte, un personnage revient toujours à ma rescousse. Et ce personnage, c’est invariablement celui de mon père. Alors, encore une fois, voici ce que cela a donné :

LOVAT

Photo: origine muséale inconnue via internet

Un brin d’histoire (il y a du vrai là-dedans. À vous d’en faire le partage.)

La boucane noire du vieux LOVAT était visible depuis l’horizon, juste à l’ouest de l’Île d’Entrée. Preuve que la terre était bien ronde, on ne voyait pas encore les mats et encore moins la cabine du vapeur.

C’était noir de monde sur le quai du Havre-Aubert, mais que se passait-il? Les élections approchaient et le bruit avait circulé que Hormidas Langlais était à bord. La brise était douce en ce jour de vieux printemps et sur le quai, les femmes portaient leur plus beau chapeau, les crinolines se soulevaient à peine et madame la mairesse se laissait fusiller du regard venant des quelques jalouses placoteuses du village.

Finalement, le LOVAT contourna le Bout du Bain et en peu de temps, les hommes se chicanaient presque pour déterminer qui allaient attraper les amarres lancées du bateau. Le « ganeway » fut abaissé et comme un prince au chapeau noir, Hormidas descendit la passerelle, saluant tout le monde comme un prêtre bénissant ses ouailles alors que toute la foule applaudissait.

Ensuite, ce fut Monseigneur Arseneau puis son Chanoine qui en fit autant, suivis immédiatement d’une flopée de cornettes pointues des bonnes sœurs du couvent. En procession presque idolâtre, la foule suivit le cortège au son des klaxons des voitures appartenant aux notables de la place et moi…

Moi à 5 ans

Et moi qui n’avais que cinq ans, j’attendais toujours en bas du « ganeway ». Il était là, tout là-haut, chemise sale, noircie de cambouis, sueur à la poitrine, sourire aux lèvres et sac de marin sur l’épaule. Il descendit d’un pas leste la rampe et me prit dans ses bras comme si je n’avais pesé que toute la joie qui envahissait mon être.

J’enfouis mon visage dans cette chemise empestant le charbon et la sueur puis je dis : « Ça sent le travail »… et il éclata d’un grand rire, un rire que j’entends encore aujourd’hui, comme si j’étais encore dans ses bras.

sur MacKinnon t

GG

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