dimanche 15 décembre 2013

Histoire d’une passion, Partie 1 (suite 4)

Construction et belle amitié
Je ne peux exposer les prochaines photos sans expliquer le rôle primordial qu’a eu mon ami Norbert Dufourneau que je surnommais à la blague « micro-ondes ». Norbert était un « Pied noir » expatrié en France après la guerre d’Algérie et puis comme il le disait : « échoué aux Îles ». Ingénieur de formation, passionné d’aviation et d’une santé précaire, il s’était mis en tête que si je réussissais mon projet, c’était comme si je complétais ce qu’il n’avait pu réaliser alors qu’il était plus jeune. Au hasard d’une rencontre dans un café, il était entré dans ma vie. Je devrais dire dans « notre vie », celle de Jeannine et moi. Mon projet et mon atelier constituaient presque la totalité de ses intérêts quotidiens alors que les « muffins » aux carottes que Jeannine lui concoctait et qu’il appelait des « mu-fins » étaient devenus une source d’affection et d’admiration sans bornes pour cette dernière. Norbert avait un coeur d’or et physiquement, un coeur mal en point. Âgé d’à peine le début de la soixantaine, il n’avait qu’une obsession; toujours être vivant en l’an 2000 pour voir ce qui allait se passer dans l’univers.
 P 9

Norbert Dufourneau

Extraits de mon registre de construction
27 avril 1992 (après 337 heures de travail) Depuis le 11 mars que Norbert Dufourneau vient m’aider chaque soir, fidèle au poste comme s’il était mon employé. Ce n’est pas toujours facile de travailler avec lui, mais quelle aide il m’a apportée. Sa passion pour l’aviation, son expérience de vie, sa frustration de n’avoir pu réaliser ce que je suis en train de construire le pousse souvent à vouloir prendre le leadership du projet. Au début, il a fait son nid en s’imposant presque. Aujourd’hui, je me sens égaré sans lui. Son aide m’est devenue très précieuse. Il est ma troisième main, mon cahier de révisions, mon correcteur et souvent mon directeur de conscience quand je veux aller trop vite. Son effet catalyseur m’a fait oublier le temps, prendre confiance en mes moyens et réaliser que je ne suis plus tout seul avec mes idées « un peu bizarres ».
L’homme est ainsi fait. Il a besoin de ne pas se sentir seul, même dans ses rêves les plus fous. C’est justement là qu’il a besoin de se sentir épaulé. Avec l’appui inconditionnel de Jeannine, puis l’aide précieuse de Norbert, je peux affirmer aujourd’hui que je commence vraiment à croire que mon « Sky-Pup » maintenant  officiellement identifié C-INNÉ et qui sera baptisé plus tard «Idéfix» volera avec moi à son bord dans le beau ciel bleu des Îles de la Madeleine.

La vraie construction des ailes commence
Avant toute chose, quelques mots de vocabulaire s’imposent.
Bord d’attaque : L’avant de l’aile. Partie qui fait face au vent.
Bord de fuite : L’arrière de l’aile.
Longeron de structure : La structure principale interne.
Intrados : Le dessous de l’aile.
Extrados : Le dessus de l’aile.
Une aile
Enfin, mes attaches d’ailes sont terminées. Il faut maintenant construire tout autour du longeron pour que les ailes prennent leur forme. Paul Pontois m’a appelé en soirée pour me dire qu’à cette étape, la partie principale et la plus importante de mon avion était réalisée. Pourtant, rien de tout ça ne ressemble à un avion. « T’en fais pas. Quand ça va commercer à ressembler à un avion, c’est qu’il sera presque terminé » qu’il me dit.
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Norbert s’y met sur le sablage. Il faut que tout soit extrêmement droit et doux pour y poser le contreplaqué par-dessus le moule permanent en styromousse. Il faut tailler 20 formes du bord d’attaque pour chaque aile mesurant 12 pieds (3,65 m) de longueur et le tout doit être parfaitement aligné.
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Voilà, le bord d’attaque est recouvert de contreplaqué d’une épaisseur marginale de 1/32e de pouce d’épaisseur (grade aviation)… et très coûteux. /50.$ pour 16 pi,ca (1,5 m² ).
P 3P 4
Là c’est du sérieux. Il neige dehors, il fait chaud dans l’atelier. C’est le temps de placer les moules permanents de l’aile à l’arrière du longeron, le tout collé dans l’époxy.
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Jeannine joue la photographe avant d’aller cuisiner les « obligatoires (mu-fins) ».
P 6P 7
Remarquez la ligne de référence posée sur le plafond de l’atelier. Tout doit être immobile et surtout parfaitement aligné. Le moindre désalignement donnerait une aile au profil tordu. Une aile ainsi, même dans l’erreur la plus minime, aurait pour conséquence de forcer le pilote à constamment corriger sur les commandes, que ce soit en montée, en descente ou en virage, ceci sans compter un danger de décrochage accentué (perte de portance).
P 8
 Voilà, les deux structures d’ailes sont maintenant terminées. Le bord d’attaque est scellé, mais avec quelques trous d’aération (1/4 de pouce…0,6 cm), les attaches d’ailes sont parfaitement encastrées dans toute la structure, les nervures (les côtes en styromousse) qui donnent la forme définitive aux ailes sont toutes alignées et bien collées en plus de la boiserie parfaitement droite qui en ferme le bord de fuite. Reste maintenant à remiser le tout hors d’atteinte afin de passer à la réalisation du centre structurel sur lequel viendront s’attacher dans un angle de 6 degrés les fameuses attaches dont je suis plus que rassuré et satisfait. À ce stade, Paul Pontois m’annonce que 50 % de mon avion est construit. Pourtant, les ingénieurs qui ont dessiné les plans affichent un temps de construction de 300 heures. J’en suis rendu à 356 heures et j’ai de la difficulté à concevoir que 50 % des travaux sont effectués. Enfin, nous verrons. En attendant, il est temps d’aller goûter les « mu fins » de Jeannine.
À la semaine prochaine pour la construction du centre de ces ailes si précieuses.
GG












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